L’heure est à la réduction des dépenses et, encore une fois, c’est aux agents malades que le rapport IGF/IGAS de juillet 2024 s’en prend en proposant de les pénaliser davantage avec des jours de carence supplémentaires et avec la réduction du taux de remplacement de leur rémunération en arrêt maladie. L’UNSA Fonction Publique s’élève contre cette vision purement économique, dénuée de toute considération pour les personnes et les situations qu’elles subissent.
Tout et son contraire
Le postulat de la mission IGAS/IGF serait de faire en sorte que la moyenne de jours d’absence pour raison de santé soit identique pour les agents publics et les salariés.
Cependant, la mission fait elle-même le constat que les différences sont dues aux caractéristiques des agents (âge, sexe, état de santé) et de leur emploi (type de contrat, catégorie socio-professionnelle, diplôme). La seule différence « inexpliquée » serait un écart entre la fonction publique territoriale et le privé qui « ne serait que la moitié de celui observé ».
Le problème c’est que cette mission ne dispose pas de données fiables qui permettraient d’analyser cet écart. Elle le dit très justement, la fonction publique ne dispose pas de suivi harmonisé des absences et elle ne peut pas connaître le niveau réel des absences en 2023.
Néanmoins, elle « suppose » qu’il faut prendre des mesures de réduction de ces absences qui s’appliqueraient à tous les agents par équité avec le secteur privé.
De quelle équité s’agit-il ?
Lorsque la loi de finances pour 2012 a instauré un jour de carence pour arrêt maladie dans la fonction publique cela s’est déjà fait sous prétexte « d’équité entre secteur privé et secteur public ». Dans le secteur privé, la sécurité sociale prévoit certes trois jours de carence en cas d’arrêt maladie. Mais il s’agit du taux réglementaire, ces trois jours peuvent être compensés partiellement ou complètement par les entreprises, dans les faits 70 % des salariés du secteur privé bénéficient d’un maintien de salaire par l’employeur et ne subissent donc pas la sanction des jours de carence, ils bénéficient en outre de la participation de leur employeur à leur mutuelle et à leur prévoyance.
L’UNSA rappelle que les employeurs publics, jusqu’à présent, ont pour la plupart fait l’économie de leur contribution à la protection sociale complémentaire et à la prévoyance des agents publics. Donc la mission préconise que l’on applique une même mesure réglementaire à des situations de prise en charge de fait très différentes, c’est justement ce que l’on appelle de l’inéquité. Cet état de fait n’est pas prêt de s’arrêter puisque les employeurs publics ont refusé la prise en charge de ces mêmes jours de carence dans l’accord sur la protection sociale des agents de la fonction publique.
Qu’est-ce que l’absentéisme pour raison de santé ?
La mise en place d’une telle mesure sous-entend :
- Un abus de droit : l’agent malade qui se rendrait chez le médecin ne serait pas malade ou pas malade au point de devoir s’arrêter selon une norme que l’on ne connait pas,
- La complaisance fautive du médecin ou son incompétence : le médecin établirait des arrêts de travail de complaisance ou se tromperait sur la véracité de la maladie, ce qui n’est pas une vision très positive des compétences médicales, qui rappelons-le sont soumises à des contrôles.
- Pour lutter contre ces abus individuels, une sanction financière serait instituée, dont les effets sont collectifs, en s’appliquant non seulement aux abus individuels « présumés » mais à tous les arrêts maladie sauf quelques cas dérogatoires.
- Une sanction financière devient un acte de prévention dans le domaine de la santé, c’est un peu comme si pour lutter contre la fraude fiscale, tous les contribuables se voyaient appliquer une sanction financière par prévention bien en amont de contrôles fiscaux individuels. Le fait que vous soyez malade deviendrait une sanction supplémentaire à celle que vous inflige une pathologie et ce de manière systématique, quel que soit votre comportement. Même si pendant toute votre carrière vous n’avez pas été malade et donc pas eu d’arrêt, vous serez sanctionné. Si vous exercez un métier pénible dans des conditions de travail difficiles, vous serez sanctionné. Si votre santé est fragile et que vous avez des vulnérabilités particulières, vous serez sanctionné. Si vous souffrez de maladies chroniques mal reconnues comme l’endométriose, vous serez sanctionné. Pour le moins, cela pose des questions qu’il s’agirait de débattre.
Une telle mise en scène pour faire des économies sur le dos des agents malades n’est vraiment pas glorieuse.
L’UNSA Fonction Publique réitère sa revendication pour l’abrogation du jour de carence dans la fonction publique et pour tous les salariés.
Bagnolet, le 5 septembre,
Annick Fayard
Secrétaire nationale UNSA Fonction Publique